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Nikos Kazantzakis

Eleni N. Kazantzakis, épouse et compagne d'une vie

Biographie

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Eleni N. Kazantzakis, née Samiou, a rencontré Nikos Kazantzakis le 18 mai 1924. Née en 1903, elle n’avait pas encore tout à fait vingt et un ans et lui en avait quarante et un. Le Crétois fut en proie à un coup de foudre serein. La jeune Athénienne, quant à elle, était littéralement troublée par la présence de ce bel homme charismatique, déjà mythique. Elle avait face à elle un grand écrivain qui la fascinait.

Ce jour-là, la célèbre pianiste Marika Papaïoannou avait incité Eleni à participer à une réunion d'intellectuels à Dexameni pour y rencontrer Nikos Kazantzakis. Quelques années plus tard, Kazantzakis lui-même encouragerait Aimilios Chourmouzios, son fidèle ami chypriote qui brillait à Athènes, à rencontrer Marika Papaïoannou. En fait, il jouait les entremetteurs. Et dans les deux cas, les rencontres ont été couronnées par un mariage. Les couples ont été unis par l'amitié pour la vie.

Nikos et Eleni Kazantzakis ont vécu ensemble pendant environ vingt ans avant de s’unir par le mariage le 11 novembre 1945, à Athènes, en l’église Saint-Georges Karytsis, avec comme témoins Angelos Sikelianos et son épouse Anna. Nikos et Eleni vivaient alors à Égine, effectuant souvent des voyages à l'étranger. En 1946, ils ont choisi de s'exiler et se sont finalement installés à Antibes, dans le sud de la France. C'est la mort qui les a séparés. Dès lors, Eleni, veuve et seule, s'est employée à servir son œuvre, jusqu'à sa propre mort, en 2004.

Eleni avait été orpheline très jeune. Chez le beau Crétois, elle avait trouvé tout ce dont la vie lui était redevable, tout ce dont elle avait été privée du fait de sa condition d'orpheline. Son père était originaire d'Asie mineure. Il était professeur à l'École polytechnique nationale Metsovio et responsable des Forêts au ministère des Finances. C'est lui qui a fondé la société de protection des forêts et qui a décidé de la plantation de pins sur la colline d'Ardittos où se trouve le stade Panathinaïko, encore appelé « Kallimarmaro ». Sa mère était d'origine crétoise.

Eleni représentait tout pour Nikos. C'était l'amie fidèle, la compagne et l'épouse parfaites, la secrétaire infatigable, celle qui veillait à tout avec vigilance afin qu'il crée sans soucis ni entraves. C'était son ange gardien. Il s'est reposé sur elle et est devenu encore plus grand. Par son amour, son affection, son amabilité et sa bonté infinies, elle a su adoucir sa vie âpre. Eleni a toujours eu en elle une superbe distinction. « Je dois à Eleni », a écrit Kazantzakis, « tout le bonheur de chaque jour de ma vie, sans elle je serais mort depuis longtemps ». « Trente-trois ans à ses côtés », aimait à dire Eleni, « je n'ai jamais eu à rougir d'aucun de ses actes ». Kazantzakis évoque aussi Eleni dans Lettre au Greco : Bilan d'une vie, s'adressant au Greco au sujet de leurs épouses respectives : « vaillante compagne de lutte, grande consolation, source fraîche dans le désert inhumain que nous traversons. La pauvreté, le dénuement ne sont rien, pourvu que l'on ait une bonne épouse. Nous avions tous deux une bonne épouse, la tienne s'appelait Jeronima, la mienne Hélène. Quelle chance était-ce là mon aïeul ! Que de fois, en les regardant, n'avons-nous pas dit tous deux en nous-mêmes : – Bénie soit l'heure de notre naissance ! »1

Eleni était également auteur, mais elle a choisi de se consacrer à l'avancée de l'œuvre de son compagnon et époux. On peut mesurer l'étendue de sa contribution, ne serait-ce qu'au niveau technique, rien qu'en rappelant qu'elle a dactylographié sept fois (!) L'Odyssée aux 33 333 vers À l'époque, il n'y avait évidemment pas d'ordinateurs. En outre, c'est elle qui l'a poussé à s'intéresser au roman. Il lui soumettait tous ses textes afin d'avoir son avis, son approbation. Eleni maîtrisait également la sténographie, un atout majeur pour l'époque. Nikos la taquinait à ce propos, prétendant que c'était elle qui avait introduit la sténographie en Grèce.

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Son œuvre maîtresse fut la biographie de Nikos Kazantzakis : Le Dissident (Nikos Kazantzaki vu à travers ses lettres, ses carnets, ses textes inédits). Elle a d'abord paru en français en 1968 à Paris, et la même année en anglais à Londres et à New York, puis en allemand en 1972, en espagnol en 1974, en grec en 1977, en hongrois en 1979 et en roumain en 1981. Pour cet ouvrage qualifié de « biographie du siècle », Eleni a été récompensée par l'Académie d'Athènes en 1979 : « C'est avec beaucoup de soin et au prix de longs efforts qu'Eleni N. Kazantzakis a composé un ouvrage remarquable, Le Dissident ». Le prix a été remis à Eleni au cours de la séance solennelle de l'Académie, le 29 décembre 1979.

Eleni a également composé La Sainte Vie de Mahatma Gandhi qui a d'abord été imprimé en français en 1934 à Paris et en Suisse, en espagnol en 1936 à Santiago du Chili et enfin en grec en 1983, à Athènes. Elle a aussi consacré un ouvrage à l'auteur gréco-roumain Panaït Istrati. Elle a également écrit un livre sur la Chine, Κίνα, Μικρή Πορεία στη Μεγάλη Χώρα, imprimé à Nicosie en 1976, à L'imprimerie Zavallis située aux abords de la ligne verte2, sous la direction de Patroclos Stavrou. Eleni a rédigé le compte-rendu du voyage effectué avec Nikos en 1957 au Japon et en Chine, comme l'avait fait Kazantzakis en 1935 pour son voyage en solitaire. Le carnet de voyage Chine-Japon a été édité jusqu’en 2006 sans le nom d’Eleni, mais dans la nouvelle édition enrichie et améliorée de 2006, son nom figure aux côtés de celui de Nikos. 

Eleni a également été journaliste et auteur de poèmes. Elle a donné de nombreuses conférences et allocutions aux quatre coins du monde, dans des universités et autres institutions, ainsi que des interviews pour la radio et la télévision sur Kazantzakis, la Grèce et Chypre. L'université américaine Drake de l'Iowa l'a élevée le 18 mai 1974 au rang de docteur honoris causa en sciences humaines. Sa présence intellectuelle de par le monde suivait la renommée de Nikos Kazantzakis qu'elle faisait elle-même croître. En 1983, avec le centenaire de la naissance de Kazantzakis, elle a fait une tournée aux États-Unis, de la côte Est à la côte Ouest, en compagnie de son fils adoptif, Patroclos Stavrou. Ils sont intervenus dans des universités et autres instituts et ont également rencontré les Grecs établis aux États-Unis. En octobre 1983, à l'université d'État de San Francisco, Eleni et le président de l'université ont inauguré la chaire Nikos Kazantzakis. C'est Patroclos Stavrou qui en a prononcé le discours officiel.

Quelques années après la mort de son époux, Eleni a quitté Antibes et s'est installée à Genève. Son appartement est devenu un lieu de pèlerinage pour les intellectuels du monde entier et, parfois, le lieu de rencontres de Grecs persécutés par la junte. En 1968, elle a hébergé des personnalités opposées à la junte qui devaient témoigner contre celle-ci auprès de la Cour européenne des droits de l'homme. Sous le régime des colonels, elle a donné des conférences dans de nombreux pays sur la démocratie et la liberté, ainsi que contre la dictature militaire. Durant les sept années de la dictature, elle n'a pu se rendre en Grèce. Chypre est devenue sa patrie, la maison de Patroclos et de Mary Stavrou, son refuge, en particulier lors des fêtes et des vacances d’été. C’est également à Chypre qu’elle a décidé d’éditer ses livres. Le couple Kazantzakis aimait beaucoup Chypre. Nikos et Eleni s'y sont rendus ensemble pour la première et dernière fois en 1926. Kazantzakis lui a dédié de très nombreuses pages et y a fait maintes fois allusion. Il n'aura cependant pas eu le temps d'y retourner, comme il le désirait ardemment.

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Le 3 août 1973, Eleni est devenue la marraine de Niki née à Genève. Le premier appartement qu'ait connu Niki fut celui d'Eleni à Genève. Son baptême a eu lieu en la cathédrale Saint-Jean à Nicosie et la messe fut célébrée par l'archevêque Makarios. Leur ami Odysseas Elytis était également présent.Lors du putsch de la junte d’Athènes contre Mgr Makarios – le 15 juillet 1974 – et de l'invasion turque barbare – le 20 juillet 1974 –, Eleni était à Keryneia, au Pente Mili, à l'endroit même de l'invasion. Eleni et Mary P. Stavrou ont été interrogées par les putschistes pour être finalement faites prisonnières par les Turcs.

Pour aider Chypre, Eleni a fait imprimer ses livres ainsi que tous les romans de son époux avec une nouvelle maquette, utilisant l’impression monotype, à l’imprimerie Zavallis, à Nicosie. En outre, elle a fait des dons aux victimes de la tragédie chypriote, à savoir les victimes du coup d'État et de l'invasion turque, et a contribué à la restauration d'œuvres d'art de l'archiépiscopat de Chypre qui avaient subi des dommages lors du putsch. Par ailleurs, les droits d’auteur des représentations des œuvres de Kazantzakis jouées à Athènes ont été placés sur un compte bancaire en faveur des victimes de la tragédie chypriote, comme cela s’est également produit en 1975 avec la série télévisée tirée du roman Le Christ Recrucifié diffusée sur la chaîne publique ERT. 

Après la mort de son époux, à Fribourg, en Allemagne, le 26 octobre 1957, Eleni a quitté Antibes, au sud de la France, où elle avait vécu avec Nikos, pour s’installer à Genève. Elle y a résidé jusqu'en 1989. Le 12 février de cette année-là, elle a été victime d'un terrible accident de la route dans sa rue, la rue William Favre. Patroclos et Mary se sont rendus en toute hâte à Genève et ont rejoint Eleni à l'hôpital universitaire où elle avait été admise. À compter de ce jour, ils ne se sont plus jamais quittés. Mary est restée auprès d'Eleni jusqu'à la fin du séjour de celle-ci à Genève. Le 1er mai 1989, Eleni est rentrée à Athènes et a vécu à Voula dans la famille de Patroclos, son fils adoptif, avec Mary et leur fille Niki. Nikos et Eleni n'ont pas eu d'enfant et cela les a beaucoup attristés. Il y a cependant deux choses qu'Eleni dit ne jamais avoir regrettées : le fait d'avoir épousé Nikos Kazantzakis et celui d'avoir adopté Patroclos Stavrou.

La compagne et épouse de Nikos Kazantzakis est décédée en pleine journée à l’âge respectable de 101 ans. « Je suis une centrale électrique et vous en êtes le courant. S’il se coupe, je meurs. », lui avait écrit Nikos, il y a bien longtemps. Le courant s'est coupé le 18 février 2004, jour anniversaire de la naissance de Nikos Kazantzakis et Eleni s'en est allée rejoindre Nikos, son bien-aimé.

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